Éléments permettant de présumer de l'existence d'un harcèlement moral

Une salariée est licenciée pour absences répétées désorganisant le fonctionnement de l'entreprise. Elle demande l'annulation de son licenciement en estimant que ses absences sont la conséquence d'un harcèlement moral dont elle a fait l'objet.

 

La cour d'appel l'a déboute. Elle retient que si les pièces qu'elle a produites permettent l'établissement de faits qui laisse présumer des agissements répétés de harcèlement moral de la part de son employeur, elle n'a en cependant apporté aucun élément (tel qu'un certificat médical ou même des attestations) susceptible de prouver que le harcèlement moral dont elle a été  victime était la cause de ses absences répétées ou participait au processus qui les avait générées.

 

 

La Cour de cassation considère « qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté l'existence d'agissements susceptibles d'altérer la santé physique ou mentale de la salariée et permettant de présumer l'existence d'un harcèlement, en sorte qu'il revenait à l'employeur d'établir que le licenciement était justifié par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement, la cour d'appel a violé les textes susvisés ».

 

Cass. soc., 15 janv. 2014, n° 12-20.688, P+B

Rupture conventionnelle et harcèlement

La Cour de cassation a pris position sur la possibilité de conclure une rupture conventionnelle avec un salarié victime de harcèlement. Dans un tel contexte, le consentement du salarié est nécessairement vicié et la rupture produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

 

Cass. soc., 30 janv. 2013, n° 11-22.332

 

Les pressions exercées par l'employeur afin que le salarié accepte une rupture de son contrat de travail peuvent constituer un acte de harcèlement moral

Constituent des faits de harcèlement les agissements répétés qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptibles de porter atteinte à la santé morale ou physique du salarié, à ses droits et à sa dignité ou de compromettre son avenir professionnel ; que dès lors en constatant qu'à partir de juin 2008 le pharmacien avait fait pression sur la salariée pour qu'elle quitte l'entreprise dans des conditions inacceptables et déloyales et, ce, malgré son état de santé fragilisé (arrêt p. 4, 7ème al), agissements justifiant sa condamnation à des dommages intérêts et en écartant néanmoins l'existence de faits laissant présumer le harcèlement.

 

La Cour a ainsi condamné les pressions répétées de l’employeur afin que son salarié accepte une rupture de son contrat de travail.

 

Cass. Soc, 6 juin 2012, n° 11-17.489 

 

Le délit de harcèlement sexuel disparaît du code pénal

 

Saisi d'une Question prioritaire de constitutionnalité (QPC) sur la définition du délit de harcèlement sexuel prévu par le code pénal, le Conseil constitutionnel a estimé que cette définition, à savoir "le fait de harceler autrui pour obtenir des faveurs de nature sexuelle", n'était pas suffisamment claire et précise.

 

Le harcèlement sexuel est également définit par le code du travail.

 

Quant-est-il aujourd’hui du harcèlement sexuel évoqué devant le Conseil de prud’hommes ?

 

Sur ce point, le Conseil constitutionnel a précisé que : « au-delà du code pénal, le harcèlement sexuel est défini de manière comparable dans le code du travail (...). Si ces dispositions ne sont pas contestées, elles sont nécessairement liées au sort de la QPC puisque leur contenu est proche de la disposition contestée".

 

Le harcèlement sexuel n’a donc pas disparu du code du travail… Affaire à suivre devant nos Conseils de prud’hommes.

 

Conseil constitutionnel, Décision n° 2012-240 QPC, 4 mai 2012

 

Harceler hors du travail ne protège pas d'une sanction 


Une collègue côtoyée dans le cadre personnel n'en demeure pas moins une collègue. La harceler sexuellement hors des murs de l'entreprise constitue une faute grave.

 

Cass. soc., 19 oct. 2011, n° 09-72.672, Sté nouvelle groupement taxi (SNGT) c/ Hurbin


Une fois licencié pour inaptitude, le représentant du personnel peut agir pour harcèlement moral

Dès lors que l'administration a donné son autorisation pour le licenciement du salarié protégé, le représentant du personnel ne peut plus contester son licenciement devant les prud'hommes. Il peut en revanche leur demander de condamner l'entreprise à des dommages-intérêts pour le harcèlement moral dont il a été victime au travail.

 

Cass. soc., 15 novembre 2011, n° 10-10.687

Cass. soc., 15 novembre 2011, n° 10-18.417

Cass. soc., 15 novembre 2011, n° 10-30.463

 

Reprocher à un salarié une insuffisance professionnelle peut constituer un acte de harcèlement moral

Lorsque l’employeur n’a pas permis au salarié d’exécuter correctement son travail, il ne peut lui reprocher une insuffisance professionnelle.

Au cas d’espèce, avait été reproché, à plusieurs reprise, à une salariée des erreurs et anomalies dans ses travaux de comptabilité. Le ton sur lequel lui avait été fait ses reproches était inapproprié, «  à la limite de la correction ». De plus, la salariée avait alerté son employeur des difficultés qu’elle rencontrait, compte tenu de manque de moyens.

L’employeur n’avait pas réagi et n’avait donc pas fournit à la salariée les moyens nécessaires à exécuter correctement son travail. La salariée était ainsi dans un état dépressif réactionnel.

 

En résumé, reprocher à un salarié une insuffisance professionnelle peut constituer un acte de harcèlement moral lorsque :

-  Des reproches sont faits sur un ton incorrect,

-  Ces reproches sur la qualité de travail du salarié ne sont pas étayés par des éléments probants

-  Si l’employeur n’a pas permis au salarié de réaliser son travail en lui fournissant tous les moyens nécessaires pour y parvenir, malgré les demandes du salarié.

 

Cass. soc., 28 septembre 2011, n° 10-18.520, Sté Godin c/ Brauer

 

Evolution de la notion de harcèlement moral dans la fonction.

Lorsque l’employeur n’a pas permis au salarié d’exécuter correctement son travail, il ne peut lui reprocher une insuffisance professionnelle.

Au cas d’espèce, avait été reproché, à plusieurs reprise, à une salariée des erreurs et anomalies dans ses travaux de comptabilité. Le ton sur lequel lui avait été fait ses reproches était inapproprié, «  à la limite de la correction ». De plus, la salariée avait alerté son employeur des difficultés qu’elle rencontrait, compte tenu de manque de moyens.

L’employeur n’avait pas réagi et n’avait donc pas fournit à la salariée les moyens nécessaires à exécuter correctement son travail. La salariée était ainsi dans un état dépressif réactionnel.

 

En résumé, reprocher à un salarié une insuffisance professionnelle peut constituer un acte de harcèlement moral lorsque :

-  Des reproches sont faits sur un ton incorrect,

-  Ces reproches sur la qualité de travail du salarié ne sont pas étayés par des éléments probants

-  Si l’employeur n’a pas permis au salarié de réaliser son travail en lui fournissant tous les moyens nécessaires pour y parvenir, malgré les demandes du salarié.

 

Cass. soc., 28 septembre 2011, n° 10-18.520, Sté Godin c/ Brauer

 

Le Conseil d'Etat aligne sa jurisprudence sur celle du privé :

-       Les fonctionnaires bénéficient désormais d'un « allégement » de la preuve.

-       En cas de harcèlement avéré, l'employeur verra sa responsabilité automatiquement engagée.

 

Le Conseil d'Etat vient de rendre une décision de principe, dans laquelle les agents publics bénéficient des même garanties que ceux du privé en matière de harcèlement moral.

En effet, les fonctionnaires se voient désormais soumis aux mêmes règles d'administration de la preuve.

 

En outre, la responsabilité de l'employeur joue automatiquement et intégralement.

Le Conseil d’Etat, dans son arrêt du 11 juillet 2011 a donc transposé les principes issus de la directive européenne du 27 novembre 2000 et relative à l’administration de la charge de la preuve en matière de harcèlement moral.

 

La haute juridiction administrative a ainsi considéré que « Considérant, d'une part, qu'il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement ; qu'il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile ».

 

De plus, le comportement agressif de l’agent victime de harcèlement moral n’exonère pas l’employeur de sa responsabilité et ne constitue pas une faute de l’agent.

 

Le Conseil d’Etat a, en effet, décidé que :

« Considérant, que, pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'agent auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral ; qu'en revanche, la nature même des agissements en cause exclut, lorsque l'existence d'un harcèlement moral est établie, qu'il puisse être tenu compte du comportement de l'agent qui en a été victime pour atténuer les conséquences dommageables qui en ont résulté pour lui ; que le préjudice résultant de ces agissements pour l'agent victime doit alors être intégralement réparé ».

 

L’employeur public devra donc indemniser intégralement le fonctionnaire.

CE., 11 juillet 2011, n° 321225, Montaut

 

 

Harcèlement : l'employeur doit prendre les mesures nécessaires et efficaces pour faire cesser les actes de harcèlement moral.

Le salarié, victime de harcèlement ne peut être licencié pour des faits commis en réaction au harcèlement subi.

En effet, l’employeur est tenu à une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs.

Manque à cette obligation lorsqu'un salarié est victime, sur son lieu de travail, de violences physiques ou morales exercées par l'un ou l'autre de ses salariés, quand bien même il aurait pris des mesures en vue de faire cesser ces agissements.

 

L’employeur doit donc réagir immédiatement et prendre les mesures qui permettent de faire cesser les actes de harcèlement moral.

 

Il ne doit pas non plus licencier une salariée pour des faits commis en réaction au harcèlement subi.

 

Le licenciement prononcé à l'encontre d'un salarié pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral est nul.

 

Lorsque le harcèlement est caractérisé et que le comportement reproché au salarié est une réaction au harcèlement moral dont il a été victime, son licenciement est nul.

 

Cass. soc., 29 juin 2011, n° 09-69.444, Association hospitalière Nord Artois cliniques (AHNAC) c/ Penalva

 

Cass. soc., 29 juin 2011, n° 09-70.902, association Fédération unie des auberges de jeunesse c/ Strelezki

 

Quelques précisions en matière de harcèlement moral

Cass. soc., 6 avr. 2011, n° 09-71.170 D

Appréciant souverainement les éléments de preuve qui lui étaient soumis, la cour d’appel relève qu’après son congé de maternité, la salariée avait, le 12 juin 2005, été victime d’une agression verbale et physique du dirigeant de l’entreprise qui l’avait molestée et injuriée, qu’à la suite de ces faits pour lesquels elle avait déposé plainte, elle avait été en arrêt de travail pour maladie et qu’à son retour, le 29 juin suivant, elle avait subi des changements quotidiens de tâches et de secteur et une mise à l’écart des autres employés auxquels elle ne devait pas adresser la parole. En l’état de ces motifs dont il résultait que la salariée avait subi la matérialité de faits laissant présumer l’existence d’un harcèlement, fût-ce pendant une durée limitée, la cour d’appel qui a relevé que l’employeur n’établissait pas que ceux-ci étaient justifiés par des éléments étrangers à tout harcèlement, a exactement décidé que le préjudice subi par Mme P. de ce chef devait être réparé.